Impact de la nutrition sur l’inflammation intestinale et la susceptibilité de l’hôte dans un contexte de maladie de Crohn
N. Barnich Nutrition Clinique et Métabolisme Volume 31, Issue 3, September 2017, Pages 224
Introduction et but de l’étude
De récentes études ont montré que la réponse inflammatoire anormale observée chez les patients atteints de la maladie de Crohn implique l’interaction entre le microbiote intestinal, des facteurs génétiques et environnementaux. L’augmentation de la consommation de matières grasses et de sucres rapides dans les pays occidentaux semble être corrélée à une augmentation de l’incidence de la maladie de Crohn.
Matériel et méthodes
L’impact d’un régime riche en graisses et en sucres rapides (HF/HS) a été déterminé chez la souris après une durée de 18 semaines. La micro-inflammation du tractus digestif, la sensibilité des souris à une colite induite au DSS, la composition de la flore intestinale, la concentration en acides gras à courtes chaînes (AGCC) et l’expression de leur récepteur (G-protein-coupled receptor 43) ont été étudiés. Le taux fécal de lipocaline-2 a été mesuré par elisa afin de suivre l’inflammation à bas bruit au cours du régime. La sévéritéde la colite induite au DSS a été évaluée par l’indice d’activité de la maladie (DAI : Disease Activity Index), le score histologique et la production de cytokines pro-inflammatoires. Les populations d’E. coli associées au côlon, à l’iléon et au cæcum ont été quantifiées. Des transferts de flore de souris ayant reçu un régime de type HF/HS et de souris recevant un régime conventionnel ont été réalisés dans un modèle de souris axéniques. Le récepteur GPR43 a été visualisé par microscopie confocale après immunomarquage de la muqueuse colique. Des souris ont été traitées avec un agoniste de GPR43 et l’impact de ce traitement sur l’intégrité de la barrière intestinale et les paramètres inflammatoires a été évalué.
Résultats
Le taux de Lcn-2 est augmenté dans les selles dès 5 semaines de régime suggérant ainsi qu’un régime alimentaire HF/HS favoriserait un environnement propice à l’inflammation intestinale. Il a pu être observé des proportions anormales d’E. coli au niveau de l’intestin des souris ayant reçu le régime HF/HS comparativement aux souris nourries avec un régime conventionnel. En outre, la transplantation en souris axéniques d’une flore issue de souris préalablement nourries avec un régime HF/HS entraîne des taux de colonisation par les E. coli plus élevés comparativement aux souris transplantées avec un contenu fécal de souris nourries avec un régime conventionnel. Par ailleurs, le régime de type occidental conduit à une exacerbation de l’inflammation intestinale suite à une colite induite au DSS avec une augmentation du score DAI et de la production de cytokines pro-inflammatoires. Les concentrations en AGCC diminuent significativement chez les souris recevant un régime HF/HS. Ainsi, un régime alimentaire de type occidental semble conduire à une dysbiose en faveur d’une augmentation des bactéries pro-inflammatoires et d’une diminution des bactéries productrices d’AGCC. L’expression du récepteur GPR43 semble diminuée chez les souris recevant un régime HF/HS par rapport à des souris sous un régime conventionnel. Il a été observé une diminution significative du score DAI, du taux de lipocaline-2 et des cytokines pro-inflammatoires chez les souris supplémentées avec un agoniste de GPR43comparativement aux souris témoins.
Conclusion
Un régime alimentaire de type occidental conduit à une modification du microbiote intestinal caractérisée par une augmentation des bactéries pathogènes opportunistes conduisant ainsi à la mise en place d’un microenvironnement inflammatoire. Par ailleurs, l’activation du récepteur aux AGCC, le GPR43, pourrait être envisagé en tant que nouvelle stratégie thérapeutique afin de restaurer l’intégrité de l’épithélium intestinal.