Je ne pense pas que ces recherches vont orienter nos comportements alimentaires dans le bon sens
Quand les odeurs influencent nos choix alimentaires
Nutrition Clinique et Métabolisme Volume 30, Issue 2, June 2016, Pages 114 S. Chambaron
Introduction et but de l’étude
Pendant longtemps, les recherches ont considéré que nous étions pleinement conscients des motivations guidant nos comportements. Actuellement, les travaux en psychologie suggèrent qu’en matière de choix, nous ne sommes pas aussi rationnels que cela. Nos comportements alimentaires n’échappent pas à cette règle. Il est maintenant admis qu’une grande part de nos choix alimentaires est davantage guidée par des processus non conscients que par une réflexion consciente. Néanmoins, peu de travaux permettent de mesurer objectivement l’effet de signaux olfactifs, non attentivement perçus, sur le comportement alimentaire. Le but de nos travaux est de tester, au moyen d’un paradigme d’amorçage, si une odeur alimentaire, non attentivement perçue, peut modifier les choix alimentaires d’adultes. Nous présenterons ici une synthèse de deux études d’amorçage.
Matériel et méthodes
Lors de deux études, 190 participants sont venus au laboratoire sous un faux prétexte. Ils ont été répartis soit dans des groupes expérimentaux (conditions odorisées) soit dans des groupes témoins (condition non odorisée). Ils ont patienté dans une salle d’attente qui avait été au préalable odorisée soit avec une odeur de poire (n = 57), de pain au chocolat (n = 38), ou non odorisée (n = 95). L’intensité de l’odeur était relativement faible afin que les participants ne la perçoivent pas attentivement. Durant ce temps d’attente, ils réalisaient une tâche leurre afin de les faire patienter tous dans les mêmes conditions. Ensuite, ils quittaient cette salle et allaient dans une autre, dans laquelle ils devaient choisir différents aliments présentés sur un buffet (une entrée, un plat et un dessert) afin de constituer leur plateau pour le déjeuner.
Résultats
Les résultats indiquent que :
– comparativement aux participants du groupe témoin, ceux ayant été amorcés avec l’odeur de poire choisissent plus de desserts à base de fruits (compote de pomme) que des desserts à haute densité énergétique (brownie) ;
– comparativement aux participants du groupe témoin, ceux ayant été amorcés avec l’odeur de pain au chocolat choisissent plus de desserts à haute densité énergétique (gaufre).
Conclusion
Un stimulus olfactif de faible intensité, non attentivement perçu, peut activer certaines représentations dans le cerveau. Une fois amorcées, ces représentations semblent donc pouvoir modifier le comportement de choix d’un élément du repas (le dessert) au cours duquel sont habituellement consommés des aliments de la catégorie évoquée par le stimulus odorant (fruits, aliments sucrés). Parvenir à mieux comprendre les processus non conscients sous-tendant les choix alimentaires pourrait, in fine, permettre de proposer de nouvelles stratégies permettant d’orienter les choix alimentaires vers des aliments « sains ». Actuellement, nous étudions l’impact d’odeurs de viande et de légume sur les choix alimentaires. Dans un contexte de croissance démographique et d’augmentation de la consommation de viande au niveau mondial et d’une consommation insuffisante de légumes, il est impératif de favoriser un rééquilibrage alimentaire. C’est pourquoi, nous souhaitons étudier si ce paradigme d’amorçage olfactif pourrait être un outil permettant de modifier les choix du plat principal, comme cela a été précédemment montré pour le choix du dessert.