Consommation de fruits et légumes et risque de fragilité à 2 ans chez des personnes âgées vivant à domicile : étude Trois-Cités Bordeaux
Nutrition Clinique et Métabolisme Volume 30, Issue 3, September 2016, Pages 227 B. El Rahi
Introduction et but de l’étude
De fortes concentrations en vitamines B6, B12, folates, C, D et E, en carotenoïdes et en sélénium seraient protectrices du risque de fragilité des personnes âgées. Sources majeures de ces vitamines et minéraux, les fruits et légumes pourraient également être associés à une moindre fragilité. À notre connaissance, à ce jour, aucune étude n’a examiné cette association chez les personnes âgées en particulier. Notre objectif était d’examiner l’association dose–réponse entre la consommation de fruits et légumes et l’incidence de la fragilité à deux ans, dans une population de personnes âgées françaises vivant au domicile.
Matériel et méthodes
La présente étude est une analyse secondaire des données bordelaises de l’étude prospective multicentrique Trois-Cités (3 C). L’échantillon était constitué de 584 sujets âgés de 75 ans et plus indépendants aux activités de base de la vie quotidienne, et initialement non fragiles, vus à deux reprises entre 2009–2010 et 2011–2012. La fragilité a été définie par la présence d’au moins trois des cinq critères suivants : perte de poids non intentionnelle, fatigue, faiblesse musculaire, lenteur de la marche et faible activité physique. Les consommations quotidiennes initiales de fruits et/ou de légumes ont été mesurées à partir d’un questionnaire de fréquence alimentaire. L’étude de l’association entre consommation de fruits et/ou légumes et risque de fragilité à 2 ans a été réalisée grâce à des modèles de régressions logistiques ajustés sur l’âge, le sexe, l’éducation, l’indice de masse corporelle, la présence des maladies chroniques, le nombre de médicaments, la symptomatologie dépressive, les performances cognitives et un score d’adhérence au régime méditerranéen modifié, ne prenant pas en compte les consommations de fruits et légumes.
Résultats et analyse statistique
Après deux ans de suivi, 79 personnes (13 %) étaient identifiées comme fragiles (moyenne d’âge de l’échantillon d’étude final 81,7 ans [ET 4,1]). Considérées séparément, ni la consommation de fruits (trois portions par jour au moins), ni celle de légumes (deux portions par jour ou plus) n’étaient associées significativement au risque de fragilité à 2 ans (odds ratio [OR] = 0,48 ; intervalle de confiance à 95 % [IC95 %] = 0,48–1,17 ; p = 0,11 et OR = 0,58 ; IC95 % = 0,29–1,13 ; p = 0,11) dans les modèles multivariés complets. Cependant, pour les consommations totales de fruits et légumes, une consommation de deux à quatre portions/jour était associée significativement à une réduction de 59 % du risque de fragilité (IC95 % = 17–79 % ; p = 0,012) après 2 ans de suivi, comparée à une faible consommation quotidienne (une portion ou moins) alors qu’une consommation de cinq portions/jour et plus ne l’était pas (OR = 0,50 ; IC95 % = 0,21–1,22 ; p = 0,13)
Conclusion
Ces résultats suggèrent qu’une consommation combinée de fruits et légumes, mais pas de fruits ou légumes seuls, serait associée à un moindre risque de fragilité chez les personnes âgées de 75 ans et plus. Le bénéfice est observable dès deux portions de fruits et légumes par jour. Cette cible semble facilement accessible et pourrait avoir des conséquences importantes en termes de réduction du risque de fragilité de la population vieillissante.