Le potentiel antioxydant des aliments : mythes et réalités
The antioxidant capacity of foods: Myths and reality
Olivier Dangles Cahiers de Nutrition et de Diététique Vol 55 - N°4 - août 2020 P. 153-211
Points essentiels
• La TAC est une mesure sommaire de la capacité d’un extrait à donner des électrons.
• Les polyphénols agissent en antioxydants dans l’aliment et le tractus digestif.
• Les polyphénols protègent les AGPI de l’alimentation contre l’oxydation.
• Les polyphénols sont fortement métabolisés dans le tractus digestif et dans le foie.
• Les effets des métabolites dans les tissus ne sont pas nécessairement antioxydants.
Résumé
Les composés réducteurs d’origine végétale sont abondants dans l’alimentation, notamment les composés phénoliques (polyphénols). Ils sont trop souvent qualifiés d’antioxydants alors que cette notion reste floue et ouverte aux abus. Certes, les polyphénols et autres micronutriments réducteurs peuvent contribuer à la protection des acides gras polyinsaturés (AGPI) contre l’oxydation, non seulement dans les aliments (y compris en tant qu’additifs) mais aussi dans le tractus digestif. Cette aptitude peut être sommairement évaluée par la capacité antioxydante totale (TAC) mais doit être confirmée dans des tests plus élaborés mettant en jeu les AGPI. Par contre, les créditer d’une activité antioxydante dans les tissus (au-delà du tractus digestif) sur la seule base d’une valeur TAC élevée est abusif, d’une part, parce que la lutte contre le stress oxydant chronique via une alimentation riche en produits végétaux implique une grande variété de mécanismes et reste indissociable d’actions anti-inflammatoires, d’autre part, parce que les polyphénols subissent en général un fort catabolisme par le microbiote intestinal et sont distribués aux tissus sous la forme de métabolites de structures très différentes de celles des formes initialement présentes dans l’aliment.
Summary
Reducing compounds from plants are abundant in our diet, especially phenolic compounds (polyphenols). They are too often termed antioxidants whereas this notion remains fuzzy and open to abuse. Polyphenols and other reducing micronutrients can actually participate in the protection of polyunsaturated fatty acids (PUFAs) against oxidation, not only in foods (including as additives) but also in the digestive tract. This aptitude can be summarily evaluated by the total antioxidant capacity (TAC) but must be confirmed in more elaborate tests involving PUFAs. By contrast, crediting them with an antioxidant activity in tissues (beyond the digestive tract) on the sole basis of a high TAC value is abusive, on the one hand because fighting chronic oxidative stress via a plant-rich diet involves a great variety of mechanisms and remains tightly associated with anti-inflammatory actions, on the other hand because polyphenols generally undergo extensive catabolism by the intestinal microbiota and are distributed to tissues under the form of metabolites whose structures are very different from those of the dietary forms.