Tout ce que vous devez savoir sur les vitesses d'absorption des protéines.
En particulier ce que l'on ne vous dit pas !
Tout le monde parle des protéines à absorption rapide et des protéines à digestion lente.
La whey, du fait de sa vitesse d’assimilation, stimule rapidement et fortement la synthèse des protéines musculaires, mais, cet anabolisme n'est que de courte durée. Au contraire, la caséine, du fait de sa lenteur d’absorption est plutôt anti-catabolisante, cela sur une longue durée.
Et si ces informations étaient inexactes ? Pourquoi n'a t'on pas intérêt à ce que la vérité soit dite ?
Un peu d'histoire
C'est en 1997 qu'une étude française réalisée par Yves Boirie a révolutionné l'usage des protéines (1).
L'étude de Boirie a montré, pour la première fois, qu'il ne fallait pas opposer ces deux protéines, car leurs effets étaient différents et complémentaires. Ces conclusions ont été largement reprises par les vendeurs de protéines. Les guerres de la whey contre la caséine et réciproquement ont cessé. Tous les marchands de suppléments se sont mis à vendre les deux types de protéines au lieu de ne se spécialiser que dans l’un ou l’autre comme ils le faisaient avant.
Quelles protéines Boirie a-t'il utilisé ?
Quand on fait référence à l'étude de Boirie, on parle de whey et de caséine sans trop se demander, parmi toutes les sortes de whey et les nombreuses caséine, lesquelles il a utilisées ?
La réponse à cette question est cruciale et pourtant peu abordée !
Pour ses recherches, le premier souci de Boirie était d'incorporer un traceur radioactif au sein même de la protéine afin de pouvoir suivre son assimilation une fois celle-ci absorbée par une personne.
Pour ce faire, il a donné directement de la leucine radioactive à une vache. Il a ensuite récupéré le lait et l'a filtré lui-même. Il n'a donc pas utilisé n'importe quelle protéine, en particulier celles récupérées dans les poubelles des fromageries (cheese whey).
Il n'a utilisé que de la protéine native (aussi appelée bio-active) de deux types :
- Un concentré de whey, native.
- Une caséine micellaire, native, obtenue par filtration (2).
Les conclusions de ses études ne s'appliquent donc pas aux protéines de mauvaise qualité telles les :
- Whey commerciales issues des fromageries (pleines d'acides aminés dégradés en glycomacropeptides lors de la fabrication du fromage : cheese whey).
- Caséinates de calcium (pas chers, mais très peu digestes).
- Les caséines ou protéines totales obtenues par co-précipitation plutôt que par filtration.
(Note: Nutrimuscle ne vend que des protéines 100% natives en particulier en ce qui concerne les whey. La caséine micellaire Nutrimuscle est filtrée comme celle de Boirie).
Les conclusions réelles de l'étude de Boirie ?
Face à un concentré de whey native, nous pouvons nous attendre à ce qu'un isolat de whey native, soit absorbé un peu plus rapidement. L'isolat est donc probablement un peu plus anabolique qu'un concentré.
Face à une caséine micellaire native, la protéine totale qui contient aussi 20% de whey (contre zéro dans celle de Boirie), va donc être absorbée plus rapidement. On peut raisonnablement s'attendre, pour elle, à une vitesse 20% supérieure ce qui se traduit par une protéine un peu plus anabolique. Par contre, sa durée d'action va parallèlement se réduire de 20% c'est-à-dire d'environ 2h de moins soit 5 heures contre 7 pour la caséine sans whey.
La limite de l'étude de Boirie est qu'elle s'applique à des personnes qui ne font pas de sport. Que se passe t'il au niveau de la vitesse d'absorption lorsque l'on prend la protéine après l'entraînement ?
De nouvelles données pharmacocinétiques
Une nouvelle étude a comparé le comportement d'une caséine micellaire native lorsque celle-ci est utilisée :
1) Juste après la musculation (8 séries lourdes pour les cuisses dans cette étude).
2) A jeun, au repos.
En 40 minutes, la prise de 20g de caséine micellaire native augmente de :
- 50% le niveau de leucine dans le sang après l'entraînement.
- 100% le niveau de leucine dans le sang au repos.
Une heure après la prise, le niveau de leucine dans le sang est :
- Quasiment revenu à son point de départ après l'entraînement.
- 50% plus élevé qu'au départ dans le cas du repos (3).
Ces différences ne s'expliquent pas du fait d'un ralentissement ou d'une malabsorption de la protéine pour cause d'entraînement. Elles traduisent une utilisation plus intense des acides aminés du fait de la stimulation de l'anabolisme musculaire par l'effort physique.
Une synergie musculation-protéines
L'étude montre également que par rapport à une situation de repos, pour une même quantité de protéines, les muscles reçoivent 56% d'acides aminés en plus lorsque les sujets ont utilisé les suppléments protéiques juste après l'entraînement.
Cette meilleure absorption explique en partie pourquoi les protéines sont 16% plus anaboliques après l'effort (3). (Note: une whey ou une protéine totale de lait aurait donné de meilleurs résultats grâce à leurs vitesses d'assimilation plus élevées).
Mais, du fait de cet anabolisme plus prononcé qui consomme des protéines, le niveau d'acides aminés sanguin va chuter beaucoup plus rapidement après l'effort qu'au repos. Il faut donc manger dans l'heure qui suit son encas post-effort.
Au contraire, d'autres études ont montré que les caséinates de calcium semblaient réfractaires à cet effet stimulant de l'anabolisme de l'entraînement : les acides aminés stagnent dans le sang, inertes, au lieu d'agir dans les muscles (4).
Moralité : il faut reprendre de la protéine assez vite après l'entraînement, y compris si on utilise une protéine dite lente (caséine native), car l'effort accélère en quelque sorte la vitesse d’assimilation de la protéine. Ceci, non pas durant la phase d'absorption, mais au niveau de son utilisation par les muscles.
Un détournement intense des protéines par le système digestif
Cette nouvelle étude montre aussi que la moitié des 20 grammes de protéines est consommée par le système digestif afin d'assurer le bon renouvellement de ses propres cellules. Il ne reste donc que 10g pour le reste du corps et en particulier pour les muscles (3).
(Note : les personnes servant dans ces études restent environ 8 heures sans manger avant le début de l'expérience afin de s'assurer que des protéines d'un précédent repas ne viennent pas fausser les données. Ce pillage des protéines par le système digestif est donc moindre chez une personne qui a mangé récemment. Il n'en reste cependant pas moins vrai que le prélèvement d’acides aminés par le système digestif, pour sa propre consommation, est élevé. Même s'il correspond à un besoin physiologique réel de la part des organes, cela fait d'autant moins de protéines pour les muscles).
Conclusion : le matin, après le jeûne de la nuit, il faut se réveiller avec une méga-dose de protéines, car à ce moment-là, l'appareil digestif va prélever une très grande partie des protéines de ce premier repas. En surdosant son apport, on garantit que ses muscles, eux aussi, recevront assez de protéines pour couvrir leurs besoins.
Référence bibliographique :
(1) Boirie Y. Slow and fast dietary proteins differently modulate postprandial protein accretion. Proc Natl Acad Sci U S A. 1997 Dec 23;94(26):14930-5. Jusque-là, les vendeurs de whey se bagarraient avec les vendeurs de caséine pour savoir laquelle de ces deux protéines était la meilleure.
(2) Boirie Y. Production of large amounts of [13C]leucine-enriched milk proteins by lactating cows. J Nutr. 1995 Jan;125(1):92-8.
(3) Pennings B. Exercising before protein intake allows for greater use of dietary protein-derived amino acids for de novo muscle protein synthesis in both young and elderly men. Am J Clin Nutr. 2011 Feb;93(2):322-31.
(4) Smith TJ. Plasma amino acid responses after consumption of beverages with varying protein type. Int J Sport Nutr Exerc Metab. 2009 Feb;19(1):1-17.